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idées du Créateur, ils sont rappelés par Mme d’Alverny 17 dans sa pénétrante analyse iconologique d’une des coupoles de l’église St Marc de Venise. Dans le cas de la chapelle Ste Marina, il s’agit — à côté d’une interprétation orthodoxe — surtout d’une fonction de protection magique de l’endroit réclamant une égide supérieure: union avec les idées du peuple et renouement avec les traditions païennes. La vallée de l'Iskǎr était une des importantes voies commerciales et militaires menant de Serdika (Sofia) vers la Bulgarie du Nord. Ceci est attesté par toute une chaîne de forteresses, de monastères et d’églises dont les restes se retrouvent de Svoge à travers Mezdra jusqu’à Červen Brjag. Le trajet semble identique à l’ancienne voie romaine reliant l’intérieur des Balkans à Dacia et à la Pannonie, et à la direction principale que suivront plus tard les expéditions militaires de Byzance. Il est intéressant de noter que le ravin qui, derrière la chapelle, monte au Sud-Est de la rivière, vers un plateau, dans la direction de Lukovit et de Loveč, porte, de nos jours encore, le nom de “Grcki dol” —— “Vallée Grecque": lors de la construction d’une chaussée vers la commune actuelle de Karlukovo, on a découvert un grand nombre de squelettes de soldats tombés. C’est par cette même route que se dirigeaient sans doute les deux expéditions de l’empereur Isaac Ange contre la rébellion des frères Asènes, dans les années 1186—1187, quand Loveč, situé à proximité, devint objet de siège. La retraite des armées byzantines dut s'effectuer par cette même route et les Byzantins ne rentrèrent plus dans ces régions. On pourrait aller même plus loin, jusqu’à formuler une conclusion plus nette encore: le nom de l’endroit peut commémorer la dernière bataille victorieuse qui libéra la Bulgarie du Nord. Au-dessus de la chapelle, sur la pente Sud du ravin, était une forteresse surmontant le rocher, actuellement délabrée, à l’exception de restes insignifiants de murailles. Jusqu’à la conquête de la Bulgarie par les Turcs, toute une série de communes existaient dans cette région (à proximité immédiate, Kunino, Gorjalata Lǎka (?), le vieux Karlukovo ou Viktorova Lǎka près du monastère, Gligora). Les intenses activités commerciales se déroulant le long du trajet, n’avaient guère disparu de la mémoire des habitants et suscitèrent, après la libération, le renouvellement de la tradition d’organiser, a la fête de la Vierge le 28 Août, des foires sur l'emplacement de l’ancienne commune de Karlukovo (Viktorova Lǎka), tradition qui se maintint un certain temps. — Endroit ayant besoin d’être protégé: les archanges en uniformes militaires de l'empire, avec des glaives soulevés, ne sont donc pas seulement les gardiens du sanctuaire, c’est-à-dire de "l’entrée au paradis" au sens liturgique, mais incarnent, en même temps, les droits et la sécurité de tous les habitants. De là leurs contours accentués qui les rendent visibles à distance. L'endroit était donc une localité importante du point de vue idéologique, et nullement l’emplacement d’une chapelle de pèlerinage insignifiante. Dédicace secrète aux archanges Michel et Gabriel? Il faut admettre qu’une telle impression se dégage de la façade visible de loin de la chapelle. De nombreuses chapelles et églises étaient, en effet, dédiées aux Sts Archanges surtout dans les régions slaves des Balkans (Ochrid,
17 Marie—Thérèse d’Alverny, Les Anges et les jours. Cahiers Archéol. IX (1957)