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d’autres pigments plus clairs appliqués pour la détrempe. Leur absence témoigne d’une technique des fresques avancée, qui n’avait guère besoin de redonner de l’"éclat" au coloris par l’emploi de la détrempe. Dans les conditions climatiques de la région, de pareils tons n‘auraient d‘ailleurs pu se conserver. Les terres de ferre de ton rouge employées en des combinaisons et mélanges variés forment la base de la richesse du coloris; on peut y distinguer deux tons qui diffèrent, dans l‘analyse spectrale, par d'insignifiantes déviations dans le contenu du manganèse: si son contenu augmente, on obtient un ton violet typique qui rappelle l’hématite. Tous ces tons sont d’origine indigène, sans doute, les terres ayant été extraites des grottes karstiques du ravin d’Iskăr, et on peut leur donner le nom d’"hématite rouge et violet", à la différence de la "sinopia", couleur rouge brique clair. La sinopia a servi à l’exécution du dessin de fond; la gamme du coloris est due à la superposition de trois, sinon de plus, de couches différenciées que, par endroits, un ton contrastant — le reflet — vient relever. C’est ainsi que se produit cette vibration de couleurs que l’artiste a su pleinement mettre à profit surtout dans les peintures de la Trinité et du Sacrifice d’Abraham, lesquelles provoquent une irisation par l'alternance de la sinopia, de l’hématite planchi et de l’ocre clair. Les tons limpides des fresques sont, à l’intérieur, complétés par une légère teinte de gris-bleu de l'intonaque. Ce crépi de dessus bleuâtre, légèrement teint d’un ton violet dû à l’emploi des oxydes du fer en forme de mergel [Az-marne] (calcaire de fer) contenant de la poudre de charbon de bois moulu, remplace, à l’intérieur, le ton bleu du fond. Cette analogie avec la fonction de "refti"(?refit?) semble plutôt rare, considérée dans des correspondances plus larges; certaines analogies pourraient plus facilement être retrouvées dans la tradition de la basse antiquité (Castelseprio), dans les peintures de l’Asie Mineure, à Prespa et, rarement et sous une forme différente, chez Théophane le Grec à Novgorod.22 On sait comment la chaux, lors de l‘application du pigment au crépi, change la valeur du ton (le rendant plus clair) et combien il est difficile de deviner l’effet final. Ce n’est guère un fait fortuit que ce soit justement ce dernier phénomène qui a toujours influencé la structure picturale de la fresque, consistant en l’application de petites plaques de couleur simples et homogènes — donc en une technique d’une extrême simplification. Aux simples tons locaux et aux contrastes des rehauts commence, cependant, à se substituer, dans les fresques balkaniques à partir du XII siècle, un coloris plus raffiné et délicat, comptant avec des transitions molles et diluées entre les différentes teintes, en une perfection jamais atteinte jusque-là. L’effet de ce genre qui se fait valoir surtout dans la peinture si fine des montagnes, des plis irisants de la robe d’Abraham, ou dans les nuances caractérisant la scène de la Transfiguration, a été rendu possible justement grâce à la structure spécifique de l‘intonaque: la diminution de pourcentage de la chaux à la superficie et le ton grisâtre permettant une fine graduation des nuances. On peut supposer à juste titre que le changement dans la technique de la fresque, signalé pour Ste Marina, était lié aux exigences nouvelles, imposées aux peintres; exigences qui, en principe, semblent identiques à celles qui donnèrent la naissance à la "détrempe illuminative" de l’école tchèque du XIV
22 A. V. Vincer, Материалы и техника монументально-декоративной живописи. Moskva 1953, 143.